Le Togo accueille depuis ce lundi 12 mai 2024, la Conférence de l’Union Africaine sur la dette publique, un rendez-vous organisé à Lomé jusqu’au 14 mai sous le thème, « L’Agenda africain de gestion de la dette publique en matière de restauration et de préservation de la viabilité de la dette ». Les travaux ont été ouverts par le Président du Conseil, Faure Gnassingbé en présence de plusieurs personnalités de haut rang, dont John Dramani Mahama, Président du Ghana. Au cœur des échanges, la soutenabilité de la dette africaine, sa gestion dans un contexte de transformation mondiale, et surtout la quête d’une souveraineté financière continentale.

Dans son discours d’ouverture, le Président du Conseil du Togo, Faure Gnassingbé, a livré une allocution forte, structurée autour de cinq points clés, qui esquissent les bases d’une doctrine africaine renouvelée en matière de dette. Voici les grandes lignes de son intervention.

Une crise silencieuse mais structurelle

Faure Gnassingbé a rappelé que la dette n’est plus un risque potentiel mais une réalité quotidienne pour l’Afrique. Pus de 20 pays sont en situation de détresse ou à haut risque d’endettement. Et ce, malgré deux décennies de réformes majeures en matière de gouvernance et de transparence. En 2024, le continent a déboursé plus de 160 milliards de dollars pour le service de sa dette, un montant supérieur aux budgets alloués à la santé ou à l’éducation.

Le Président togolais dénonce une architecture internationale injuste, « Ce n’est pas une fatalité économique, c’est le résultat d’un système pensé ailleurs, pour d’autres priorités. »

Revoir les cadres d’analyse et sortir de la camisole budgétaire

Le second point aborde l’obsolescence des critères actuels de viabilité de la dette. Faure Gnassingbé remet en cause des modèles trop conservateurs, accusés de produire des projections pessimistes qui entraînent des politiques d’austérité anticipée et freinent les investissements.

Il appelle à une nouvelle doctrine de la dette, où l’endettement ne serait plus vu comme un mal en soi, mais comme un outil de transformation économique, à condition qu’il soit bien encadré et orienté vers des investissements de qualité.

Refuser l’hypocrisie sécuritaire : la dette doit permettre de financer la paix

Le Président du Conseil dénonce également l’aveuglement du système financier international sur le lien entre sécurité et dette. Alors que de nombreux pays africains, dont le Togo, consacrent une part croissante de leur budget à la lutte contre le terrorisme et l’instabilité, ces dépenses ne sont pas reconnues comme prioritaires dans les évaluations de dette.

« Une dette est-elle soutenable si elle empêche un État d’assurer la sécurité de ses citoyens ? », interroge-t-il. Il plaide pour que les dépenses de sécurité soient considérées comme des biens publics mondiaux, et que les pays africains puissent y consacrer des emprunts stratégiques.

Financer l’Afrique, c’est investir dans la stabilité globale

Faure Gnassingbé appelle ensuite la communauté internationale à la lucidité : aider l’Afrique à financer son développement est un impératif stratégique, pas un acte de charité. Il souligne le danger d’un désengagement occidental dans un contexte où les besoins d’adaptation au changement climatique et de transformation économique sont pressants.

Il rappelle que l’instabilité en Afrique entraînerait inévitablement des crises migratoires, climatiques et géopolitiques à l’échelle mondiale. Il faut donc « des ressources, pas des injonctions ».

Bâtir une ambition africaine collective autour de la dette

Enfin, Faure Gnassingbé insiste sur la nécessité d’une stratégie panafricaine coordonnée. Il appelle à dépasser les gestions isolées de la dette pour bâtir une doctrine commune, portée par des institutions régionales fortes et des projets structurants partagés.

« L’Afrique n’est pas en quête d’assistance, elle est en quête de marges de manœuvre », affirme-t-il, appelant à renforcer la coordination macroéconomique régionale et à parler d’une seule voix dans les forums internationaux.

Vers une doctrine africaine de la dette ?

Le Président du Conseil souhaite que la Conférence de Lomé marque un tournant, où l’Afrique affirme non seulement sa volonté de rembourser, mais surtout sa détermination à avancer. Il appelle à faire de cet événement le point de départ d’un « agenda africain pour la souveraineté budgétaire, la transformation économique et la justice internationale ».

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