Face à une pénurie aiguë de personnel de santé qualifié, l’Organisation Ouest-Africaine de la Santé (OOAS), en collaboration avec ses partenaires techniques et financiers, a organisé du 26 au 31 mai 2025 à Lomé, un atelier régional de révision, de finalisation et d’alignement des curricula harmonisés de formation en épidémiologie de terrain et de laboratoire (FELTP) à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest. Cet atelier s’inscrit dans un effort concerté pour renforcer durablement les capacités en santé publique dans l’espace CEDEAO.
Une réponse à une crise structurelle
La sous-région ouest-africaine fait face à un défi majeur, une grave pénurie de ressources humaines pour la santé, aggravée par la migration continue des professionnels vers des zones urbaines, le secteur privé ou l’étranger. Selon l’OMS, il manquera 10 millions d’agents de santé à l’échelle mondiale d’ici 2030, une situation encore plus alarmante dans les pays à revenu faible et intermédiaire, dont les 15 États membres de la CEDEAO. La densité moyenne actuelle de professionnels de santé y est estimée à seulement 0,73 pour 1 000 habitants, bien en deçà du seuil minimum recommandé.
Le FELTP : une formation vitale en santé publique
Introduit en Afrique en 1993, le Programme de Formation en Épidémiologie de Terrain (FETP), devenu FELTP avec l’intégration de la composante laboratoire, s’est imposé comme un pilier fondamental dans la formation de professionnels capables de détecter, surveiller et répondre efficacement aux épidémies et autres urgences de santé publique. Ce programme s’inscrit dans l’approche One Health, intégrant médecins, biologistes, vétérinaires, pharmaciens et experts en santé environnementale.
Un enjeu d’intégration régionale
Malgré les progrès notables, des disparités persistantes dans les curricula et les approches pédagogiques du FELTP entre pays, voire à l’intérieur des mêmes pays, entravent la mobilité et l’intégration des professionnels de santé publique dans la région. C’est dans ce contexte que l’OOAS a organisé cet atelier pour harmoniser les curricula à trois niveaux de formation, première ligne, intermédiaire et avancée.
Une méthodologie inclusive et interactive
L’atelier s’est déroulé en trois sessions techniques, l’analyse comparative des curricula existants pour identifier les convergences et divergences; la structuration des modèles pédagogiques, en tenant compte des blocs linguistiques (francophone, anglophone, lusophone) et des disciplines transversales telles que le changement climatique, le genre et la résistance aux antimicrobiens.m; et, l’harmonisation pédagogique autour d’un programme unique et flexible pour chaque niveau, basé sur la pédagogie par problèmes (APP), favorisant l’autonomie et l’apprentissage continu des professionnels formés.
Les travaux ont animés par des experts de l’OOAS, du CAMES, des ministères de la Santé et de l’Éducation, ainsi que par des partenaires académiques et institutionnels.
À l’issue de l’atelier, des curricula harmonisés et validés ont été mis à disposition des États membres, avec des modules standardisés, des unités de crédits clairement définies, et un plan de cours minimum pour chaque niveau de formation. Ces documents seront disponibles sur le site de l’OOAS et diffusés dans tous les pays membres.
La stratégie de mise en œuvre inclura l’identification d’institutions de formation dans les différents blocs linguistiques et l’intégration des enseignants qualifiés issus de diverses disciplines pour assurer une formation multidisciplinaire.
Une vision régionale pour un impact global
Cet atelier s’inscrit dans une série d’initiatives de l’OOAS depuis 2008, qui a déjà permis l’harmonisation de 54 programmes de formation pour les professions médicales, paramédicales, infirmières et pharmaceutiques. Il répond également aux exigences de l’article 60 du Traité révisé de la CEDEAO, qui appelle les États membres à harmoniser leurs politiques d’éducation et de formation, et à faciliter la mobilité des professionnels qualifiés.
Une étape clé vers la sécurité sanitaire collective
Pour le Directeur général de l’OOAS, Dr Melchior Athanase J.C. Aïssi, «Nous ne pouvons pas espérer réussir l’agenda de la santé dans notre région sans résoudre la crise des ressources humaines. L’harmonisation des curricula FELTP constitue une réponse structurée à un besoin urgent de professionnalisation, d’intégration et de renforcement de la résilience sanitaire en Afrique de l’Ouest.»
Alors que le monde fait face à des crises sanitaires de plus en plus fréquentes et complexes, l’Afrique de l’Ouest affirme, par cette initiative, sa détermination à bâtir un système de santé publique fort, intégré et préparé à répondre aux défis sanitaires du XXIe siècle.